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Publié par La Pluie du Dharma

Dans la dimension historique, tout dharma est un dharma conditionné. Dans la dimension ultime, tout dharma est un dharma inconditionné.

 

« Ce n’est que provisoirement que nous distinguons les dharmas conditionnés et inconditionnés. En fait nous ne pouvons pas placer le nirvana à côté des dharmas conditionnés et appeler le nirvana un dharma (phénomène). C’est comme pour l’eau, nous ne pouvons pas dire que l’eau est l’une des vagues. Ces dernières montent et descendent, naissent et meurent. Mais il y a quelque chose qui ne naît ni ne meurt, ne monte ni ne descend, et que nous appelons l’eau. C’est une erreur de dire que l’eau est un phénomène et de la placer au même niveau que les phénomènes de vagues, de dire que l’eau est une des vagues.

La même chose est vraie entre le nirvana et les phénomènes conditionnés. Nous avons étudié suffisamment pour être capables de voir que sur le plan phénoménal, le plan de la dimension historique, tous les dharmas conditionnés connaissent la naissance et la mort, l’être et le non-être, l’existence et la disparition. Cependant dans la dimension ultime de la réalité, les phénomènes ne naissent ni ne meurent, ne montent ni ne descendent, ne viennent ni ne partent. Un dharma tel cette fleur de chrysanthème, sur le plan des phénomènes, est conditionné puisqu’il dépend de conditions pour se manifester et qu’il dépend de conditions pour se dissoudre. Mais dans la dimension ultime, la nature propre du chrysanthème est la non-naissance et la non-mort, le non-être et le non-non-être, la non-existence et la non-disparition. En regardant bien, le chrysanthème est également inconditionné. C’est ce qui apparaît très clairement dans les enseignements du Mahayana : la nature originelle des dharmas est la vacuité ; ils ne naissent ni ne meurent, ne sont ni purs ni impurs, ni croissants ni décroissants. Pour cette raison, il n’existe aucun dharma qui soit conditionné, tous les dharmas sont inconditionnés, sans naissance et sans mort, sans montée et sans descente, sans être et sans non-être.

Nous avons commencé par dire que l’espace n’est pas un dharma inconditionné ; à présent nous affirmons l’inverse : l’espace est aussi un dharma inconditionné. La phrase « l’espace n’est pas un dharma inconditionné » est une porte d’entrée, et non un dogme dans lequel nous enfermer. En disant : « l’espace n’est pas un dharma inconditionné », nous pourrions être piégés par une distinction entre ce qui est conditionné et ce qui ne l’est pas. Mais grâce à notre capacité de contempler et d’abandonner les termes et les notions, nous pouvons voir que l’espace aussi est inconditionné.

(…) Si vous venez de la tradition chrétienne, il se peut que vous éprouviez des difficultés lorsque vous pensez à Dieu, parce que dans la théologie chrétienne Dieu est le créateur, tandis que toutes les choses que nous rencontrons sont les créatures. Certains théologiens chrétiens affirment que « Dieu est la fondation de l’être », ce qui est très proche de la pensée « l’inconditionné est le nirvana ». Dire que Dieu est la fondation de l’être, c’est comme de dire que le nirvana est la dimension ultime de tout ce qui naît et meurt.

Ne recherchons pas le nirvana en dehors de la naissance et de la mort. Dans le cycle de naissance et de mort, il y a le nirvana. La naissance et la mort ne sont que des illusions. L’essence du chrysanthème ou du nuage, c’est le nirvana, la non-naissance et la non-mort.»

Comme cela nous est rappelé dans la Sangha, nous sommes invités à toujours étudier les enseignements, les soutras, les shastras (commentaires) et les entraînements à la pleine conscience (vinaya) en nous posant la question : quel rapport cela a-t-il avec ma vie de tous les jours ? Comment puis-je toucher concrètement, régulièrement l'inter-être et la dimension ultime de la réalité ?

... Après cette immersion dans la vision perçante de notre maître Thay, déposons toute cogitation et tout effort intellectuel par un Toucher de la Terre. Nous vous proposons plusieurs modalités de pratique en fonction de votre préférence :

  1. Lire régulièrement le texte pour vous laisser imprégner.
  2. Le lire après une méditation silencieuse où vous avez pris le temps de revenir à votre respiration, à votre corps, à vos sensations pour rendre votre esprit disponible à l'accueil du sens du texte.
  3. Pratiquer le Toucher de la Terre avec votre Sangha (voir les instructions sur les sons de cloche, etc, au bas du texte)

Vous pouvez lire le texte à voix haute en vous tenant debout devant votre autel ou tourné vers la nature, et prendre la posture du Toucher de la Terre à la fin.

Cher Bouddha, chaque fois que je marche sur la Terre, je réalise que matière et esprit ne sont que des notions, deux facettes d'une même réalité. Le chêne n'est pas seulement de la matière car il a le savoir en lui. Un grain de poussière n'est pas uniquement de la matière puisque chacun de ses atomes contient l'intelligence, c'est une réalité vivante. Quand je regarde la Terre profondément, je peux y voir la présence du soleil et sa chaleur qui aident toute chose à naître et à grandir. Si cette planète est si belle, c'est grâce à la chaleur du soleil. Je peux aussi y voir les ruisseaux d'eau fraîche couler depuis les profondeurs. Sans l'eau, comment y aurait-il de la vie sur cette planète ? Je peux également sentir la présence de l'air et de tous les gaz dans l'atmosphère comme l'oxygène, le dioxyde de carbone... Sans ces gaz, il n'y aurait pas de vie et il n'y aurait pas non plus la beauté du saule vert, des fleurs jaunes, toutes ces petites merveilles de la nature. Partout je peux voir les quatre éléments : la terre, l'eau, l'air et le feu. La terre est l'un des quatre éléments fondamentaux mais elle contient les trois autres éléments car elle est faite d'éléments non-terre. Il en est de même pour l'eau, l'air et le feu : un élément contient les trois autres. Ces quatre éléments portent aussi en eux le temps, l'espace et la conscience. Ils inter-sont et se relient les uns aux autres. Ils inter-sont également dans mon corps de manière merveilleuse. Les quatre éléments présents dans mon corps et les quatre éléments présents dans le cosmos ne sont pas des réalités séparées. Ma nature est aussi la nature de la Terre et de tout l'univers, c'est la nature de l'inter-être.

Je veux toucher la Terre avec mon front, mes deux bras, mes deux jambes, afin de sentir que je fais un avec la Terre-Mère, que je fais un avec la lumière du soleil, avec les rivières, les lacs, l'océan, et avec les nuages dans le ciel immense... La Terre-Mère m'a mis au monde, elle me porte et me nourrit. Elle m'a laissé me manifester des milliers de fois dans le passé et elle me fera me manifester encore et encore dans l'avenir. Elle m'a offert un corps merveilleux qui est aussi le sien.

( Silence pendant trois respirations)

De tout mon coeur, je touche la Terre trois fois pour lâcher prise de l'idée que je suis ce corps et pour faire un avec la Terre.

(Si vous pratiquez en Sangha avec une cloche, invitez maintenant un son de cloche pour que tous les pratiquants touchent la Terre. Restez en contact avec la Terre pendant trois longues respirations, puis invitez un demi-son de cloche comme signal de se relever, suivi de deux nouveaux sons de cloches et Touchers de la Terre)