Deuxième message Retraite d'Hiver 2015-2016
(Photo prise depuis le vaisseau Apollo 8 en orbite autour de la lune - 24 décembre 1968)
Deuxième message Retraite d’Hiver 2015/2016
« En m’éveillant ce matin, je souris.
J’ai vingt-quatre heures toutes nouvelles devant moi,
Je fais le vœu de vivre chaque instant pleinement,
En posant sur le monde, les êtres et moi-même,
Un regard aimant. »TNH
Dans ce second message, nous sommes invités à mettre en pratique le petit poème (gatha) ci-dessus afin de débuter notre journée dans de bonnes conditions et de toucher en nous les éléments positifs et nourrissants qui vont nous permettre d’élargir notre vue et prendre conscience des conséquences que nos actions peuvent engendrer, c’est-à-dire, qu’est-ce qui nous amène à consommer tel ou tel produit, et qu’est-ce que cela génère par la suite en tant que pollution pour notre Terre, mais aussi, et surtout, en tant que sensation dans notre mental : - est-ce que cela est agréable, désagréable, ou bien est-ce que cela est neutre ? Comment notre façon de penser ou d’agir nourrit et arrose en nous les graines de joie, de paix, de bonheur, ou bien les arrose les graines de colère, de désespoir, de discrimination… ? Pratiquer ce petit gatha au réveil tous les matins, peut nous aider à trouver des solutions en nous-mêmes pour être moins emportés par une consommation excessive, sans conscience, parce que bien des consommations trouvent leurs racines dans notre mental en premier lieu.
« En m’éveillant ce matin, je souris. »
Essayons de pratiquer ainsi : - dès le réveil et avant de sortir de notre lit, appliquons-nous à faire quelques respirations détendues et légères tout en laissant venir sur nos lèvres et notre visage un demi sourire, ou même un vrai sourire. Cela détend tous les muscles de la face et nous met directement en contact avec notre corps et notre respiration.
« J’ai vingt-quatre heures toutes nouvelles devant moi… »
C’est le temps qui nous est imparti ; cette journée qui se présente à nous est comme une page blanche sur laquelle nous allons essayer d’écrire quelques lignes de joie ou de bonheur : - préparer un thé chaud, ou une infusion, pour notre bien-aimé, ou bien-aimée, lorsqu’il ou elle rentre du travail, peut être une ligne de bonheur ; - nettoyer notre espace de vie, cuisine, salon, chambre, ou même les toilettes, paisiblement et avec concentration, peut être une ligne de joie dans notre journée.
« Je fais le vœu de vivre chaque instant pleinement… »
Chaque instant est précieux et passe très vite ; aussi devons-nous ne pas gaspiller notre temps dans la dispersion et dans des consommations irréfléchies. Essayons de voir, par exemple, si telle ou telle consommation n’est pas une fuite face à une souffrance non reconnue, lorsqu’on se met à grignoter ou lorsqu’on « tue le temps » en regardant une émission télévisée non nourrissante.
« En posant sur le monde, les êtres et moi-même, un regard aimant. »
Le soutra du Diamant nous enseigne qu’il n’y a pas un « soi » ayant une existence propre ; si nous pensons qu’il y a un « soi », nous devons alors accepter le fait qu’il y a aussi un « non soi ».
Essayons de voir comment notre « soi » n’est fait en réalité que d’éléments qui ne sont pas nous ; par exemple nous pouvons voir dans notre corps qu’il y a de l’eau, des minéraux, des métaux… que ce corps n’est pas différent de la terre. Si nous en prenons soin, nous prenons soin de la terre aussi.
Essayons de voir comment tout notre être dépend étroitement de la vie des autres êtres vivants, tels les végétaux, les animaux, les minéraux.
Essayons de porter un regard bienveillant envers tous ces êtres vivants, en limitant une consommation qui nuirait à leur vie et à leur bien-être.
Nous sommes invités à lire et à mettre en pratique quelques petits gathas (Voir le livre de Thây : Ce Monde est tout ce que nous avons - page 133 « Poèmes pour la Terre - Méditations quotidiennes) :
Propositions de pratique :
- Revenons au corps : comment « je fais le vœu de vivre chaque instant pleinement » peut se manifester à travers nos attitudes corporelles ?
- Quand avons-nous un geste d’ouverture ou de fermeture à travers la position des jambes, des bras, de notre colonne vertébrale ? Quelles sensations les accompagnent ?
Propositions de lecture :
- Le Silence Foudroyant (livre de Thây traitant du Soûtra du Diamant, avec commentaires)
- Le Soûtra du Diamant (éditions Fayard - sans commentaires)
- Ce Monde est tout ce que nous avons (livre de Thây)
- Conversations Intimes avec le Bouddha (livre de Thây)
Témoignages :
- « En m’éveillant le matin, je laisse naître un sourire sur mes lèvres, sur mon visage. Progressivement, je porte mon attention à ma respiration et à tout mon corps, allongé dans le lit. Pendant cette prise de contact avec mon corps et ma respiration, je vois cette nouvelle journée qui se présente et je forme le vœu que chaque instant puisse être vécu pleinement, que chaque acte dans cette journée soit fait en pleine conscience. Je forme le vœu de regarder le monde, la terre avec tous ses êtres vivants et moi-même, avec un regard aimant et compatissant. Je sais que chacun de mes actes ou mes paroles, aura une portée bénéfique ou non bénéfique, sur autrui, sur mon environnement, sur moi-même et sur la Terre.
Cette pratique quotidienne me permet d’améliorer ma prise de conscience sur mon environnement, qu’il soit physique ou humain, qu’il soit minéral ou végétal ; je ressens de plus en plus l’interdépendance qui existe et qui nous relie les uns aux autres. Je perçois plus clairement les conséquences inhérentes à une consommation mal dirigée ou mal maîtrisée, qui peut engendrer beaucoup de souffrances, notamment chez les animaux, et aussi beaucoup de destruction au niveau des ressources naturelles provenant de la terre. Ayant grandi à la campagne, dans une ferme, je sais bien que si nous détruisons notre environnement, maltraitons les animaux, nous serons nous-mêmes détruits tôt ou tard.
Au début, j’ai eu beaucoup de mal à mettre en pratique ce gatha « du Réveil », car mes nuits sont toujours très difficiles : - je respire mal, j’ai beaucoup de douleurs physiques, je me réveille la nuit et ne me rendors pas bien. Alors le réveil du matin est très souvent douloureux et au premier abord, je ne vois pas que ma journée peut être belle malgré tout. Mais j’ai gardé patience, et peu à peu j’ai pu être beaucoup plus régulier dans cette pratique toute simple et si profonde. Aujourd’hui je suis capable d’avoir un sourire en dépit des douleurs ou de mon nez toujours obstrué et de voir mon corps ou mes souffrances avec un peu plus d’amour… »
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- Clément est atypique. Homme intelligent qui, vivant avec le RSA, a pu aider sa femme restée dans son pays natal en Afrique. Son logement est équipé de meubles et d'objets de récupération. Il se donne une hygiène de vie en s'entraînant pour les marathons, auxquels il ne participe peut-être pas. C'est aussi un habitué de la bibliothèque municipale ; une figure connue de toute la ville, on peut, peut-être, le trouver bavard.
Mon ami a eu l'occasion de l'aider financièrement et un soir nous l'avons invité à dîner.
Peut-être le dîner était-il végétarien, en tous cas ce fut un moment agréable, mais Clément était lers ont commencé et nous avons compris que ce serait l'offenser que de ne rien accepter.
Donc nous avons eu du pain super blanc pour quelques jours et un poulet rôti à prix cassés.
Que faire avec ?
Tous mes ancêtres criaient « on ne jette pas la nourriture » !
Et dans mon cœur « je ne peux pas jeter la nourriture offerte par Clément ».
Pour le pain ce ne fut pas trop difficile, avec l'aide ponctuelle du grille-pain, il nous a nourris plusieurs jours, le dernier morceau un peu trop rassis est allé nourrir les oiseaux.
Pour le poulet ce fut une autre histoire ; que faire en cherchant à être végétarien ? Nous ne le sommes pas vraiment, nous mangeons un peu de viande en famille, nous n'avons pas encore réussi à dire « non merci, nous sommes végétariens », c'est un débat, en toute humilité nous avons fait ce choix de partager ainsi notre humanité.
Un poulet qui a eu une vie heureuse de poulet cela aurait était moins dur, mais un poulet, aux hormones ? Élevé dans quelles conditions ? Et qui n'était pas bon. Que faire ?
Nous avons essayé d'en manger un peu, dans l'Inter-Être avec la générosité de Clément, avec toutes les personnes qui ne mangent pas à leur faim, avec les personnes qui n'arrivent pas à s'offrir le luxe de manger biologique, avec tous ces animaux sacrifiés par ignorance ou avidité.
Nous n'avons pas pu jeter ce qui restait, mes ancêtres criaient trop fort. C'est allé dans le compartiment congélation.
Régulièrement revenait la question : « il va bien falloir faire quelque chose de ce poulet ! » et tout aussi régulièrement « on ne jette pas la nourriture », « c'est un cadeau de Clément ».
Jette ? Ne jette pas ?
Finalement, avec une sauce épicée, et du riz, nous avons consommé ce poulet, avec la même conscience et, nous l'espérons, la même compassion.
Dans les rencontres en Sangha, nous n'avons jamais évoqué cet épisode.
Nous nous prosternons profondément devant les entraînements, que nous essayons de respecter de notre mieux, en toute humilité, en toute humanité.