Textes des autres Soutras étudiés durant la Retraite d'Hiver 2012-2013
Soutra Pindapātapanisudhi
Ekottara Agama, n°6, livre 41, volume 2, 773
Voici ce que j’ai entendu :
En ce temps-là, le Bouddha demeurait au monastère d’Anathapindika, dans le Parc de Jetta. Un jour, très tôt le matin, le Vénérable Shariputra sortit de sa cabane et alla voir le Bouddha. Il toucha la Terre devant lui et s’assit sur le côté. Le Bouddha dit alors à Shariputra : « Tu as l’air vraiment calme et pur, ton visage et tes traits sont différents de ceux des autres. Dans quel samadhi, es-tu entrain de te réjouir ? »
Vénérable Shariputra répondit : « Cher Bouddha, je me réjouis souvent dans une sorte de samadhi appelé le samadhi de la vacuité. »
Le Bouddha dit au Vénérable Shariputra :
- C’est merveilleux, Shariputra ! C’est merveilleux ! C’est extrêmement précieux que tu puisses te réjouir du samadhi de la vacuité. Pourquoi cela ? Parce que parmi les samadhi, celui de la vacuité est le plus élevé. Le bhikshu qui s’établit dans le samadhi de la vacuité peut transcender les notions de soi, d’être humain, d’être vivant et de durée de vie. Il peut également transcender les notions de racines des [phénomènes conditionnées]. Comme il transcende la notion de racines des phénomènes, il ne crée plus [de karma] les racines des phénomènes et ainsi il ne reçoit plus les conséquences de ses actions. Ne les recevant plus, il ne reçoit plus ni souffrance ni bonheur comme rétribution.
« Shariputra, saches qu’à l’époque, alors que je ne réalisais pas encore l’éveil parfait, assis au pied de l’arbre de la boddhi, je me disais souvent : parce que les êtres ordinaires n’arrivent pas à maitriser les phénomènes, ils doivent tourner dans le cercle des naissances et des morts et ne peuvent pas en sortir. Ensuite j’ai découvert : parce qu’ils ne connaissent pas le samadhi de la vacuité, ils continuent à se noyer dans l’océan de la souffrance et n’ont pas l’opportunité d’arriver à l’autre rive de la libération. Le samadhi de la vacuité existe mais, ne connaissant pas cette pratique, les êtres ordinaires font naître perceptions et notions auxquelles ils s’attachent. Faisant naître des perceptions et des notions ordinaires comme cela, ils doivent subir le sort des naissances et des morts. Une fois qu’ils réalisent le samadhi de la vacuité, ils ne ressentent plus le besoin de poursuivre quoique ce soit, ainsi ils réalisent également le samadhi de la non–poursuite et transcendent donc les notions de naissance et de mort. Ici les pratiquants atteignent en même temps le samadhi de la non-forme et ressentent beaucoup de joie. N’accédant pas à ces trois samadhi, les êtres ordinaires continuent à tourner dans le samsara. Il faut observer les phénomènes jusqu’à parvenir au samadhi de la vacuité. En réalisant le samadhi de la vacuité, on atteint l’éveil parfait, l’éveil le plus élevé.
« Shariputra, à ce moment-là, je suis parvenu au samadhi de la vacuité et pendant sept jours et sept nuits, assis au pied de l’arbre de la boddhi, j’ai continué à méditer, sans que mes yeux ne se fatiguent. Shariputra, pour cette raison, il faut savoir que le samadhi de la vacuité est le plus élevé des samadhi, le roi de tous les samadhi. Shariputra, tout le monde devrait chercher les moyens de pratiquer pour parvenir au samadhi de la vacuité. Toi aussi, tu devrais faire de même. »
Après avoir entendu le Bouddha, le Vénérable Shariputra suivit ces instructions avec joie.
Soutra de la Grande Vacuité
Samyukta Agama, soutra n°297
Voici ce que j’ai entendu dire :
Un jour, le Bouddha résidait dans le village du peuple Kuru, qui élevait les vaches et les buffles. Alors le Bouddha dit aux bhikshus :
Je vais vous parler du Dharma, bel enseignement du début, au milieu et à la fin. La signification et le contenu de cet enseignement sont bons, beaux, purs [très bénéfiques pour la vie] de chasteté et pureté. C’est le soutra qui parle de la Grande Vacuité. Ecoutez attentivement et contemplez profondément.
Qu’est le Soutra de la Grande Vacuité ? C’est : ceci étant, cela est ; parce que ceci naît, cela naît, c'est-à-dire à cause de l’ignorance, il y a la formation ; à cause de la formation, il y a la conscience, etc., et ce, jusqu’à la formation de toute souffrance.
Concernant le détail : à cause de la naissance, il y a la vieillesse et la mort, il est possible que quelqu’un se pose la question : qui vieillit et meurt ? A qui appartiennent la vieillesse et la mort ? Cette personne y répondra probablement ainsi : je suis cette vieillesse et la mort, cette vieillesse et la mort sont moi-même.
Affirmer que l’âme est le corps ou dire que l’âme et le corps sont deux choses différentes, même si la formulation est différente, revient à un contenu de même signification. Affirmer que l’âme et le corps font un, c’est une vue qu’un moine chaste [comme vous] ne partage pas. Dire que l’âme et le corps sont deux choses différentes, c’est une vue que le moine chaste ne partage pas non plus. Le moine chaste doit éviter ces deux extrêmes pour entrer dans la Voie du Milieu. C’est la vue juste, et non pervertie, de la réalité telle qu’elle est des grands sages. Cela signifie qu’à cause de la naissance, il y a la vieillesse et la mort, qu’il en est de même pour l’être, la saisie, le désir, la sensation, le contact des six organes des sens, le corps et l’esprit, la conscience, la formation et l’ignorance.
Si l’autre personne se pose encore la question : qui est la formation, à qui appartient cette formation ? Elle répondra probablement : la formation est moi-même, la formation m’appartient. Elle voit que l’âme est le corps, ce que le moine chaste ne partage pas. Ou bien, elle voit que l’âme et le corps sont deux choses différentes, ce que le moine chaste ne partage pas non plus. Ce sont les deux extrêmes à abandonner pour aller droit à la Voie du Milieu. Les grands sages peuvent voir les choses tel quel et non de travers, c'est-à-dire à cause de l’ignorance, il y a la formation.
Bhikshus, si l'on arrive à abandonner l’ignorance, l’attachement et à faire naître la vision profonde, alors qui est cette vieillesse et la mort et à qui appartiennent cette vieillesse et la mort ? Si vous voyez ainsi, la vieillesse et la mort cesseront. A ce moment-là, nous savons que leurs racines seront tranchées comme le sommet d’un palmier coupé, elles n’auront aucune chance de repousser dans l’avenir. Si le bhikshu réussit à quitter l’ignorance et l’attachement et à faire naître la vision profonde, alors qu’est la naissance et à qui appartient cette naissance ? C’est ainsi que l’on examine : qu’est la formation, à qui appartient la formation ? Alors la formation cessera. A ce moment-là, nous savons que leurs racines (naissance et mort) sont tranchées comme le sommet d’un palmier coupé, elles n’auront aucune chance de repousser dans l’avenir. Si le bhikshu réussit à quitter l’ignorance et l’attachement et à faire naître la vision profonde, il comprend alors qu’à cause de la cessation de l’ignorance, la formation cesse, etc., et ce, jusqu’à la cessation de la totalité de la souffrance. C’est le Soutra de la Grande Vacuité.
Après avoir entendu le Bouddha l’exposer, les bhikshus l’ont mis en pratique avec joie.
Soutra de la Libération de l’Attachement aux Vues de l’Eternalisme et de l’Annihilation
Samyukta Agama, soutra n°300
Voici ce que j’ai entendu :
A cette époque, le Bouddha résidait dans un village du peuple Kuru, qui élevait des vaches et des buffles. Un jour, un brahmane étranger rendit visite au Bouddha, il échangea les formules habituelles de salut. Après cela, il s’assit sur le côté [devant le Bouddha].
- Moine Gotama, lui demanda-t-il, est-ce que celui qui crée le karma et celui qui reçoit la rétribution font un ?
- Je vois que ce n’est pas nécessaire de répondre à cette question, lui répondit le Bouddha. Que celui qui crée le karma et celui qui reçoit la rétribution soient ou non la même personne, c'est une question qui n’a pas de sens.
- Alors, Gotama, celui qui crée le karma et celui qui reçoit la rétribution sont-ils deux personnes différentes ?
- Qu’une personne crée le karma, et qu’une autre reçoive la rétribution, lui répondit le Bouddha, c’est une question qui n’a pas plus de sens. Je ne vais pas vous répondre.
- Quand je demande si la personne qui crée le karma et la personne qui reçoit la rétribution sont la même personne, vous dites que cette question n’a pas de sens. Et quand je demande si la personne qui crée le karma et la personne qui crée la rétribution sont deux personnes différentes, vous dites également que cette question n’a pas de sens et vous ne répondez pas. Qu’est-ce que cela veut dire ?
- Dire que la personne qui crée le karma et la personne qui reçoit la rétribution font un, dit le Bouddha au brahmane, c’est tomber dans l’éternalisme. Dire que ce sont deux personnes différentes, c’est tomber dans l’annihilation. En expliquant le Dharma et sa signification, [je] quitte ces deux [vues] extrêmes et ne fais que suivre la voie du Milieu. Cela veut dire que ceci étant, cela est ; ceci naît, alors cela naît ; basée sur l’ignorance, il y a formation, etc. et ce, Jusqu’à l’accumulation de tout un bloc de souffrance. Quand l’ignorance cesse, la formation cesse, etc. et ce, jusqu’à ce que toute la souffrance se dissolve.
Après avoir entendu le Bouddha, le brahmane se leva, le salua et s’en alla joyeux.
Soutra de la Vacuité vue à la Lumière de la Vérité Ultime
Samyukta Agama, soutra n° 335 (voir aussi le soutra n°297)
Voici ce que j’ai entendu :
A cette époque, le Bouddha résidait dans un village du peuple Kuru, qui élevait les vaches et les buffles. Un jour, le Bouddha s’adressa aux bhikshus :
Je vais vous parler d’un enseignement qui est beau au début, beau au milieu et beau à la fin, un enseignement dont la signification et le contenu sont beaux, purs, [et très bénéfiques] à la vie de chasteté et de pureté. C’est l’enseignement de la Vacuité dans l’esprit de la vérité ultime. Ecoutez- moi bien.
Qu’est l’enseignement de la Vacuité dans l’esprit de la vérité ultime ? Bhikshus, quand les yeux apparaissent, ils ne viennent de nulle part et quand ils se décomposent, ils ne vont nulle part non plus. Cela signifie que les yeux apparaissent mais n'ont pas de nature véritable. Ainsi, s’ils apparaissent, ils devront se décomposer. L’action et la rétribution existent mais il n’y a pas d’auteur. Quand cet agrégat cesse, un autre continue. Ceci est également vrai pour toutes les autres désignations conventionnelles comme les oreilles, le nez, la langue, le corps et le mental. Les désignations conventionnelles sont des phénomènes [produits et détruits] selon le principe : ceci étant, cela est ; ceci naît, parce que cela naît ; à cause de l’ignorance, il y a la formation ; à cause de la formation, il y a la conscience, etc., jusqu’à la production de tout un bloc de souffrance. De même, parce que ceci n’est pas, cela n’est pas ; parce que ceci cesse, cela cesse ; parce que l’ignorance cesse, la formation cesse ; parce que la formation cesse, la conscience cesse, etc., jusqu’à la cessation totale de la souffrance.
Bhikshus, ceci est le Soutra de la Vacuité vue à la Lumière de la Vérité Ultime.
Après avoir entendu cet enseignement du Bouddha, les bhikshus le mirent en pratique avec joie.
Soutra du Monde Complètement Vide
Samyukta Agama, soutra n°232 (voir aussi le soutra n°273)
Voici ce que j’ai entendu :
En ce temps là, le Bouddha résidait dans le monastère d’Anathapindika dans la ville de Sravasti. Un jour, un bhikshu appelé Samrddhi se rendit à l’endroit où le Bouddha était assis, il toucha la Terre devant lui, s’assit sur le côté et lui posa la question suivante :
- Cher Maître, [vous avez dit que] le monde est complètement vide. Que signifie le monde est vide ?
Le Bouddha enseigna Samrddhi :
- Les yeux sont complètement vides et ne sont pas [de nature] permanents, ils sont changeants et [également] dépourvus de soi et d’objet de soi. Pourquoi ? Parce que c’est comme cela. Si l’objet des yeux, la conscience des yeux, le contact des yeux et les conditions du contact des yeux sont suffisants, alors la sensation naît, qu’elle soit agréable, désagréable ou neutre. Cette sensation est également vide, elle n’est pas [de nature] permanente, elle est changeante et dépourvue [de soi et] d’objet de soi. Pourquoi ? Parce que c’est comme cela. [Les yeux sont comme cela] ainsi que les oreilles, le nez, la langue, le corps et le mental. C’est pourquoi je dis que le monde est complètement vide.
Après que le Bouddha eut achevé cet enseignement, le bhikshus Samrddhi le suivit et le mit en pratique.
Soutra « Toutes les Formations sont Vides »
Samyukta Agama, soutra n°273
Voici ce que j’ai entendu :
En ce temps, le Bouddha résidait au monastère d’Anathapindika (Jetavana) dans la ville de Sravasti. Un jour, le Bouddha s’adressa aux bhikshus :
Comme deux mains qui frappent provoquent du bruit, quand les yeux sont en contact avec l’image, cela fait naître la conscience visuelle. Quand ces trois éléments (yeux, image, conscience) sont rassemblés, cela fait naître le contact. Le contact fait naître la perception et la volition. Tous ces phénomènes sont dépourvus d’un soi et ne sont pas permanents. [Si l’on dit que c’est un soi, alors] c’est un soi impermanent, non éternel, non stable, changeant. Pourquoi ? Bhikshus, parce que ce sont des phénomènes produits qui doivent passer à travers la production, le vieillissement et la destruction.
Bhikshus, les formations (phénomènes) sont toutes comme de la magie, comme les flammes qui durent le temps d’un clin d’œil, elles s’arrêtent (prennent fin). Elles ne viennent ni ne partent vraiment. C’est pourquoi, bhikshus, à propos de ces formations vides, vous devriez les comprendre, garder votre joie, les contempler. Souvenez-vous toujours qu’elles sont impermanentes, qu’elles ne sont pas éternelles et ne durent pas, qu'elles changent continuellement et sont dépourvus d’un soi et d’objet de soi. Comme c’est le cas des yeux, des oreilles, du nez, de la langue, du corps et du mental. Quand les conditions telles que le mental et l’objet du mental sont présents, la conscience du mental se manifeste. Le mental, l’objet du mental et la conscience du mental se manifestent, alors cela mène au contact, à la sensation, à la perception et à la volition. Tous ces phénomènes sont impermanents, dépourvus de soi et d’objet du soi. (version abrégée)